la cour des grands

La cour des grands

Marionnette, théâtre documentaire
Dès 6 ans

Les Frères Pablof sont retournés à l’école. Avec une caméra, des questions et un micro. Ils ont besoin qu’on les renseigne. Dans la cour ils ont rencontré des nouveaux, des qui viennent de loin, d’autres de l’école d’à côté. C’est donc l’histoire d’un nouveau, un petit gars qui vient de loin. Pour lui, la cour c’est comme une forêt. Comme la forêt du Petit Poucet. Un endroit où il se perd, perd pied et fait son chemin pas à pas. Un endroit où il sème des petits cailloux, des billes ou de la mie de pain.

Ce petit nouveau voudrait bien faire des pas de géant, il demande :

« À la récré c’est le plus fort le plus grand ? C’est quand qu’on devient grand ? On finit de grandir un jour ? T’as quel âge ? Tu chausses du combien ? C’est quelle pointure, sept lieues ? »

La deuxième fois, le petit Poucet, plus grand que la première, s’aperçoit que les oiseaux ont mangé les miettes de pain. Que ce qui est arrivé une fois ne se reproduira plus. Une idée l’a foudroyé, pétrifié au milieu de la forêt : la maison, son père et sa mère appartenaient au passé ; il était tout petit et pourtant, il avait un passé. Il avait « puérilement vécu chaque instant périssable au présent, ou plutôt sur ce versant du présent qui glisse déjà vers le futur » (H Letellier, Electrico W). Le petit Poucet avait grandi parce qu’il avait désormais un passé, parce qu’il en avait pris conscience.

Note d'intention...

1) La cour de récréation, c’est un souvenir fugace, pas toujours très net, avec des émotions fortes, une odeur de vécu, les marronniers, le bitume, les lignes blanches et les feuilles mortes. Pour certains, c’est le cri libérateur ; pour d’autres, c’est une course effrénée la peur au ventre ; d’autres encore jettent un caillou de la terre vers le ciel, puis exécutent des figures à cloche pied. En
résumé : des instants intrépides pour appréhender la liberté. La liberté de faire ce que l’on veut, pendant un temps court mais répété deux fois par jour. La liberté de s’essayer aux autres sous le regard distant de l’adulte. Une liberté surveillée mais toute neuve. Une liberté qui se traduit dans le jeu : on dirait que, on aurait dit que…Tout est possible !

2) Nous nous sommes immergés dans une cour de récréation d’aujourd’hui. Regarder les jeux d’aujourd’hui, les « on dirait que » du moment, les règles construites dans l’instant. Peut-être nous rappellerons-nous des nôtres. Aller avec une camera, pêcher leurs histoires, les préoccupations enfantines, peut-être nous reconnaitrons-nous au même âge, peut-être retrouverons-nous quelques-unes de nos préoccupations d’adultes. Peut-être que les jeux des petits racontent un peu la cour des grands.

3) Dans un autre temps, rapporter au théâtre cette récolte d’histoires et, avec des marionnettes, définir la place que nous ferons au réel. Pour la scénographie, le bitume de la cour deviendra le bitume du plateau. La cour est un espace que l’on traverse physiquement mais aussi dans le temps. Les enfants y passent quelques années ; les enseignants, une vie ; nous, trois
semaines. Dans notre cour, des lignes et des chiffres dessinés sur le sol évoqueront la marelle, des limites de jeux, mais aussi un calendrier. On y trouvera un mobilier d’école trop petit pour notre taille comme si nous n’étions pas tout à fait à notre place. Quelques feuilles mortes disent combien l’année va être longue, les arbres sont tout nus depuis la fin de l’été.
Pour la manipulation, nous aurons trois matériaux au plateau : le papier, la pâte à modeler et la vidéo. Les deux premiers sont manipulés, la troisième diffusée. Une réalité sera palpable, l’autre insaisissable. Nous aurons donc une réalité physique confrontée à une réalité documentaire. Des images prises dans le réel composeront en partie la marionnette : certaines seront construites sous nos yeux, en temps réel, pendant le spectacle, comme un jeu qui s’invente entre enfants.
La vidéo aura un triple statut : tout d’abord, elle diffusera des images prises dans la cour comme un décor, des images de bitume qui débordent de l’écran pour envahir le plateau. Dans un plan plus large, elle donnera une profondeur à notre cour (plateau) et elle témoignera de l’activité intense de la récréation (celle que nous avons observée). Ensuite, elle composera une partie de la marionnette : des images de pieds d’enfants deviennent des pieds de marionnettes, comme si nous les voulions plus réelles que nature, comme si les marionnettes tout comme les enfants avaient les pieds sur terre. Enfin, des images vidéo seront traitées comme des objets du théâtre d’objets composant avec le texte, entre illustration et décalage, un langage poétique.

4) La récréation sonore (silence ?)
La dernière fois que je suis rentré dans une cour de récréation, j’étais grand, j’étais Gulliver aux grandes oreilles. J’ai marché en funambule sur les bordures de trottoir, sans marcher sur les traits, pour défier la pesanteur. J’ai marché jusqu’au marronnier et je me suis caché derrière. Là j’ai fermé les yeux pour compter, des fois qu’il faudrait chercher après, et j’ai écouté. J’ai entendu les gamelles de la cantine : il fallait tout manger sans rien distinguer, se réjouir et ravaler la nausée en même temps. Pourtant, j’avais le souvenir d’une certaine organisation, du jeudi pour les frites, du poisson seulement le vendredi. Bref, le chaos gustatif dans mes grandes oreilles de géant. Alors voilà : mes grandes oreilles font de la cour des grands un vacarme assourdissant dont je n’avais aucun souvenir. Comme si mon canal auditif en
s’allongeant (ma tête est beaucoup plus grosse) avait éloigné la cour-de-quand-j’étais-petit de mon cerveau. Ou alors mon cerveau, avec ses kilos en plus, a classé, répertorié des sons qui n’ont jamais existé, une madeleine de toilettes miniatures avec vue sur les pompes des copains. Du coup, il faudra récréationner le son de la cour aujourd’hui, sélectionner, agencer, les bruits pour trouver la petite musique qui m’accompagne maintenant. Les lilliputiens font des bruits de géants.

Camarades

Distribution
Raoul Pablof : vidéo, écriture et jeu / Stéphane Pablof : musique, écriture et jeu / Jean-Louis Ouvrard : Mise en scène / Rodrigue Bernard : Lumière.

Mentions
Coproduction : Le Centre culturel Athéna d’Auray (56). La maison des Arts et la ville de Saint-Herblain (44). Le TJP de Strasbourg, Centre dramatique national d’Alsace (67). Le Bouffou Théâtre à la coque, Hennebont (56), CEDAM (Centre de développement des arts de la marionnette). La Quincaillerie – Compagnie Papier théâtre, Vieux Marché (22). Le tas de Sable – Compagnie Ches Panses Verte, Amiens (80), Pôle des arts de la marionnette en région Picardie, missionné par le Ministère de la Culture et de la Communication au titre du compagnonnage marionnette. Le CRéAM (Centre régional des arts de la marionnette de Basse Normandie), Dives-sur-Mer (14)

Soutien : Ministère de la Culture et de la Communication – DRAC de Bretagne pour le dispositif projet artistique et culturel à l’école, l’inspection académique du Morbihan et l’école Joseph Rollo d’Auray / Conseil régional de Bretagne.
La cour des grands a été sélectionné aux Avenirs (réseau marionnettes-Thema), le 20 décembre 2013 au théâtre Paris-Villette.

Production : Association 16 rue de Plaisance. L’association 16 rue de Plaisance est soutenue par la Région Bretagne, la Ville de Rennes et Rennes Métropole.

Vidéo

Photos

Les dates